Un travail d’orfèvre

Le corps humain est incroyable. Avant la naissance déjà, lors de la conception d’un nouvel être humain, au cours de laquelle un spermatozoïde et une ovule donnent corps à un embryon, qui se développe ensuite, tel un miracle.

L’organisme, même malmené par une alimentation déséquilibrée, un stress chronique ou encore, des xénobiotiques présents partout, dans l’eau, l’air ou la terre, a pourtant toujours une solution, un plan B quand le A ne fonctionne pas ou une astuce pour régler un problème, qu’il soit à court, à moyen ou à long terme.

Évidemment, plus on prend soin de soi et plus il est harmonieux, réglé comme une horloge dès lors qu’on lui donne ce dont il a besoin (nutriments, amour) et qu’on lui épargne ce qui tend à l’encrasser (alimentation industrielle), à l’abîmer (excès en tout genre), à le dérégler (surmédicalisation, etc.) voire, à l’achever (avec tout ce qui précède).

Nous avons expliqué ailleurs, dans une série d’articles sur la physiologie digestive, combien l’acte de manger enclenche tout un mécanisme bien huilé, à partir du moment où l’on pense à manger, l’appétit venant, et jusqu’à la délivrance fécale, lorsque le sphincter anal lâche les amarres, en passant par les sens (je vois, sens, goûte ce que je mange) et les différentes étapes de la digestion.

Tout est un, mais bel et bien allumé =D


Plus globalement, l’âme, le corps, l’aura, l’esprit, le mental, chacun le(s) nommera à sa convenance, tout est un et cette unité joue à l’unisson. Voilà pourquoi les médecines alternatives, complémentaires ou encore non médicamenteuses, ayant cette vision holistique de l’être humain, ont tant de succès et surtout, de réponses pertinentes à apporter. Le découpage qu’en a fait la médecine conventionnelle, un foie par ci, une rate par là, le cerveau tout en haut et les pieds tout en bas, ne peut que dysfonctionner, en tout cas, en préventif mais aussi, bien souvent, en curatif. On ne lui enlèvera toutefois pas son utilité en cas d’urgence notamment.

Prenez le système respiratoire. Il ne se réduit pas aux seuls poumons, mais implique le nez, le larynx, la trachée, la cage thoracique et ses muscles pour inspirer et expirer, et même le foie, puisque poumons et foie sont deux émonctoires liés l’un à l’autre. L’un d’eux dysfonctionne ? C’est l’ensemble qui faillira. La naturopathie a toujours bien à l’esprit le lien entre les différents organes « filtres », appelés émonctoires ou portes de sortie, dont l’action est d’éliminer les surcharges, autrement dit, de vider avant que ça ne déborde. Les hémorroïdes illustrent très bien cette interaction. Lorsque le foie est surchargé, à cause d’un excès de protéines animales, d’alimentation ultra-transformée, de sucres à index glycémique élevé ou bien raffinés, ou encore de colère). Selon la médecine traditionnelle chinoise, il y a un fort risque d’accumulation de sang puis de congestion, le foie n’étant plus en capacité de filtrer correctement. Or, ce barrage hépatique entraîne, bien souvent, un bouchon à la sortie, qui se manifeste par des hémorroïdes. La médecine conventionnelle passera de la pommade analgésique et prescrira des médicaments anti-thrombotiques (fluidifiants), tandis qu’une approche holistique conseillera de rééquilibrer son alimentation, d’avoir recours à des plantes décongestionnantes du foie et de faire sortir sa colère.

Pour faire le lien, nous aussi, entre nos deux exemples, rappelons-nous de Rudolf Steiner (1861-1925) et de sa tripartition de l’Homme, représentée par trois pôles. Il y a d’abord un cercle, pour la tête et le cerveau ou pôle neurosensoriel, puis une croix pour la poitrine et les poumons matérialisant le pôle rythmique, et enfin un carré pour l’abdomen ou pôle métabolique. Dès lors que le rond, la croix et le carré sont proportionnés et alignés, l’être est en équilibre, donc en pleine santé. Disproportionnés et désalignés, et c’est la maladie (mal a dit).

Un petit tout dans le grand tout

Le corps humain est donc un tout, composé de liquides, d’os, de tissus (peau, parois internes, muscles, graisses, etc.), d’organes, certains vitaux, d’autres pas, d’hormones qui dirigent, d’enzymes qui exécutent, de neurotransmetteurs qui communiquent. Entre autres. Il comprend aussi plusieurs milliards de micro-organismes, à savoir, des bactéries, des virus, des champignons et autres levures, qui colonisent chacun de nous et qui, d’ailleurs, nous gratifient d’une identité microbienne unique, comme le font les empreintes digitales à chacun de nos dix doigts. Il s’agit du microbiote, vous l’aurez deviné, cet organe à part entière, appelé pour l’heure « deuxième cerveau », qui sera peut-être, un jour, amené à détrôner le premier. En attendant, ces micro-organismes nous accompagnent et nous sont d’une aide inestimable, sous réserve d’être aussi nombreux que variés et en symbiose. Bien nourri, surtout avec des fibres et de bonnes graisses, le microbiote permet un nombre considérable de réactions biochimiques, autrement dit, de fonctions, telles qu’une bonne digestion, une bonne santé intestinale, une bonne absorption des nutriments, un bon métabolisme général, une bonne gestion des émotions et surtout, une bonne immunité. Entre autres et, sans lui, pas de vie. Si, depuis bientôt deux ans, l’objectif de l’humanité (dixit une poignée d’entre elle et pas la plus bienveillante qui soit) est d’éradiquer le moindre virus, ils font pourtant partie du tout et ce, depuis la nuit des temps.

Une machine bien huilée

Le corps humain compte des milliards de cellules avec, dans chacune, une mini-usine qui bat son plein, pour notre mieux. (Re)visionnez les épisodes intemporels d’Il était une fois la vie pour vous en convaincre. Les enfants adorent, et ils ont bien raison. On y voit notamment combien des milliers d’informations sont traitées en temps et en heure, pour la synthèse (fabrication), la dégradation (transformation) ou la catalyse (destruction), puisque, comme le disait Antoine Lavoisier, « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. » L’objectif est de maintenir l’homéostasie, c’est-à-dire, la capacité de l’organisme, et de tout système d’ailleurs, à maintenir l’équilibre entre son milieu intérieur et ce qui se passe à l’extérieur, et celui de ses paramètres, tels que la température corporelle, le rythme cardiaque, la pression sanguine, la glycémie, etc. Il s’agit de maintenir une constance, tout en s’adaptant, le cas échéant, à des besoins particuliers, afin de permettre des conditions de fonctionnement optimales.

Pour cela, nous sommes dotés d’un système nerveux à double tête : l’un est central (SNC), et nous disposons des commandes, l’autre est autonome (SNA) et régule toutes les fonctions réflexes de l’organisme (cardiaque, respiratoire, digestive, ainsi que les différentes sécrétions, etc.). Nous gérons un certain nombre de fonctions, comme boire, aller faire pipi ou au lit, suite à la réception de signaux spécifiques pour le faire : le stress (cortisol) pour fuir un ours, la faim (ghréline) quand c’est l’heure de passer à table, le petit signal du réflexe recto-anal contracteur quand il est grand temps d’aller déféquer, etc. Notre SNA, aux deux modes antagonistes, orthosympathique et parasympathique, qui travaillent en synergie, prend en charge un nombre incroyable de tâches, dont nous serions littéralement submergés si nous avions à le faire volontairement : respirer, digérer, sécréter les différentes hormones et enzymes, gérer sphincters et motricité, nettoyer et renouveler les cellules et les tissus, vasculariser, innerver, faire des réserves, s’en servir ou les détruire, combattre les agents pathogènes et tant d’autres choses encore. Et c’est oublier, dans cette liste non exhaustive, les capacités de l’organisme à s’auto-régénérer, puisque des cellules meurent chaque minute et d’autres prennent la relève, de même pour les globules rouges et bien d’autres constituants. Nous l’avons oublié et nous en remettons ailleurs pour faire ce qu’il sait faire tout seul, sous réserve, toutefois, de lui en donner les moyens.

En somme, les capacités du corps humain, comme celles de tout organisme vivant d’ailleurs, sont inégalées et d’une coordination orchestrale. Nous aurions envie d’ajouter que c’est là l’invention la plus géniale qui soit. Aussi, aucune technologie, même la plus avancée, ni aucun robot n’égaleront jamais tout être humain. Inutile donc de vouloir le transcender : il l’est déjà et très bien comme ça.

Texte : Julie Lioré
Illustration : Manon Radicchi

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