Nous avons exploré la diversité des nutriments, puis celle des aliments et enfin, celle des manières de manger d’un point de vue préhistorique et historique. Cette fois-ci, nous allons aborder la diversité des manières de cuisiner et de manger sous un angle plus anthropologique. Par anthropologie, nous pourrions tout aussi bien parler de sciences humaines ou sociales, qui comprennent la géographie, la sociologie ou encore, la psychologie sociale et la linguistique. Mais faisons simple : nous avons eu envie, cette fois, de vous parler des habitudes culinaires et alimentaires à travers le monde, et à travers elles, des cultures qui le composent, ici et ailleurs.
Que ce soit en Europe, en Asie, au Maghreb, en Afrique, en Amérique ou en Océanie, les traditions culinaires et alimentaires sont enracinées et emblématiques des cultures, certaines locales, d’autres devenues globales. Nous employons le terme « culture » au sens où les membres du groupe qui le constituent partagent une histoire, des valeurs, des habitudes ou encore, des pratiques communes. La transmission a longtemps été laissée au soin de la mère. La cuisine reste encore largement, surtout dans les cultures traditionnelles et les milieux populaires, un domaine très féminin, jusque dans ses nombreux synonymes : tambouille, gamelle, popote, cantine, mangeaille, nourriture, ratatouille, soupe, etc. Hormis la cuisine des grands chefs et la gastronomie, pour le coup, fort masculines, ainsi que les pratiques évoluant vers davantage de partage des tâches domestiques et de la parité au sein des ménages « CSP + », la cuisine reste une « affaire de femmes ».
Sur un plan plus individuel, l’alimentation est intimement et profondément liée à la mère, mais aussi au corps, à la vie, au plaisir et à la commensalité en général. Ce qui explique en partie pourquoi il est si fréquent de résister au changement quand il s’impose… L’alimentation est au cœur de l’existence de chacun, à différents moments de la journée, à un rythme plus ou moins soutenu, plus ou moins régulier selon les mangeurs et ce, tout au long de la vie. Même pour celui ou celle qui ne mange pas ou peu (anorexie, frugalité) ou qui jeûne (pratique qui requiert une logistique, tant en amont qu’en aval), l’alimentation se vit, se pense, s’organise au quotidien. Reste qu’on n’est (ni on ne nait) pas tous égaux face à l’alimentation : d’une culture à une autre, d’un milieu socio-économique à un autre, d’une histoire (familiale, personnelle) à une autre, d’un métabolisme à un autre, ce qui se passe à l’intérieur de l’organisme (métabolisme) et ce que l’extérieur, le corps, laisse à voir, on est là au cœur de la diversité humaine, dans toute sa singularité et dans toute sa complexité.
La diversité est aussi celle des manières de manger, à proprement parler : à table, assis ou debout, en marchant, en prenant son temps ou vite fait, une fois, deux fois, trois fois ou plus par jour, ou bien tout au long de la journée, seul, en tête à tête ou parmi une tablée de convives, avec les doigts, des couverts (fourchette ou cuillère), ou encore des baguettes. Il y a autant de manières de manger que de mangeurs et de jours qui passent.
Quant à l’alimentation, à proprement parler, elle est un véritable « enjeu global : affectif, intime, social, culturel, anthropologique, économique, écologique, etc. », comme le met en exergue l’émission radiophonique Les Bonnes choses, à suivre chaque dimanche midi sur France culture. Mais si la cuisine est autant un art qu’un savoir-faire, qui repose aussi sur un savoir, il y a eu, ces 50 dernières années, une véritable révolution et avec elle, beaucoup de pertes. Si quantité de bonnes vieilles recettes de grand-mère sont soigneusement notées quelque part, sur un cahier ou dans les têtes, l’industrie agroalimentaire et l’alimentation industrielle ont considérablement modifié le rapport à la cuisine et à la table. L’impact sur la santé n’est plus à démontrer. En revanche, il est un fait qui, lui, agit insidieusement, il s’agit de la déconnexion, notamment chez les plus jeunes, entre les produits agricoles et les produits transformés ou ultra-transformés. En effet, aujourd’hui la plupart des enfants ignorent qu’une tranche de jambon est issue du fessier d’un porc, de même que la plupart des consommateurs ne savent pas ce qu’ils mangent réellement. Qui a le réflexe de lire la liste des ingrédients des produits industriels achetés au supermarché ? Quelle différence entre sucre et sirop de glucose-fructose ? Tant que le produit a un goût sucré. Pour beaucoup, seul le prix compte, l’alimentation doit coûter le moins cher possible. Tant pis pour le coût de revient pour le producteur de matières premières et pour sa paupérisation.
Toutefois, et nous nous en réjouissons, les acteurs responsables (individuels, collectifs, associatifs) sont tous les jours un peu plus nombreux à agir pour inverser la tendance. Il existe aujourd’hui une véritable prise de conscience des trop nombreux déséquilibres, tant au niveau de la santé publique (pandémies, dérégulations métaboliques à l’origine de pathologies d’industrialisation, chroniques, inflammatoires, cardiovasculaires ou encore dégénératives), de l’environnement (biodiversité, écosystèmes), que des économies (locales, géopolitiques). Ces consomm’acteurs font des choix, en préférant la qualité à la quantité, le bio au conventionnel, le fait maison à l’industriel, l’entier au raffiné, les saveurs naturelles aux saveurs artificielles, les produits saisonniers aux produits à l’année, les protéines végétales aux protéines animales, le flexitarisme à la viande à tous les repas, le vrac au conditionné, le local au global, les prix justes aux premiers prix, les petits volumes à la surproduction, l’usage des restes au gaspillage alimentaire. En somme, vers une consommation responsable et respectueuse de l’environnement.
Dès la rentrée, nous interrogerons le rapport plus personnel à l’alimentation. Il s’agira d’explorer les nombreuses cultures ou tendances alimentaires contemporaines, les « alimentations particulières » : intolérants ou allergiques, pratiquant la méthode Kousmine ou Seignalet, végétariens, végétaliens, « vegans », macrobiotes, halal, casher, locavores, crudivores et autres adeptes (au sens noble) des régimes paléo et cétogène. Nous questionnerons notamment le fait de savoir s’il s’agit de nouvelles tendances ou, à l’inverse, de résurgences de pratiques anciennes.
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Nous avons exploré la diversité des nutriments, puis celle des aliments et enfin, celle des manières de manger d’un point de vue préhistorique et historique. Cette fois-ci, nous allons aborder la diversité des manières de cuisiner et de manger sous un angle plus anthropologique. Par anthropologie, nous pourrions tout aussi bien parler de sciences humaines ou sociales, qui comprennent la géographie, la sociologie ou encore, la psychologie sociale et la linguistique. Mais faisons simple : nous avons eu envie, cette fois, de vous parler des habitudes culinaires et alimentaires à travers le monde, et à travers elles, des cultures qui le composent, ici et ailleurs.
Que ce soit en Europe, en Asie, au Maghreb, en Afrique, en Amérique ou en Océanie, les traditions culinaires et alimentaires sont enracinées et emblématiques des cultures, certaines locales, d’autres devenues globales. Nous employons le terme « culture » au sens où les membres du groupe qui le constituent partagent une histoire, des valeurs, des habitudes ou encore, des pratiques communes. La transmission a longtemps été laissée au soin de la mère. La cuisine reste encore largement, surtout dans les cultures traditionnelles et les milieux populaires, un domaine très féminin, jusque dans ses nombreux synonymes : tambouille, gamelle, popote, cantine, mangeaille, nourriture, ratatouille, soupe, etc. Hormis la cuisine des grands chefs et la gastronomie, pour le coup, fort masculines, ainsi que les pratiques évoluant vers davantage de partage des tâches domestiques et de la parité au sein des ménages « CSP + », la cuisine reste une « affaire de femmes ».
Sur un plan plus individuel, l’alimentation est intimement et profondément liée à la mère, mais aussi au corps, à la vie, au plaisir et à la commensalité en général. Ce qui explique en partie pourquoi il est si fréquent de résister au changement quand il s’impose… L’alimentation est au cœur de l’existence de chacun, à différents moments de la journée, à un rythme plus ou moins soutenu, plus ou moins régulier selon les mangeurs et ce, tout au long de la vie. Même pour celui ou celle qui ne mange pas ou peu (anorexie, frugalité) ou qui jeûne (pratique qui requiert une logistique, tant en amont qu’en aval), l’alimentation se vit, se pense, s’organise au quotidien. Reste qu’on n’est (ni on ne nait) pas tous égaux face à l’alimentation : d’une culture à une autre, d’un milieu socio-économique à un autre, d’une histoire (familiale, personnelle) à une autre, d’un métabolisme à un autre, ce qui se passe à l’intérieur de l’organisme (métabolisme) et ce que l’extérieur, le corps, laisse à voir, on est là au cœur de la diversité humaine, dans toute sa singularité et dans toute sa complexité.
La diversité est aussi celle des manières de manger, à proprement parler : à table, assis ou debout, en marchant, en prenant son temps ou vite fait, une fois, deux fois, trois fois ou plus par jour, ou bien tout au long de la journée, seul, en tête à tête ou parmi une tablée de convives, avec les doigts, des couverts (fourchette ou cuillère), ou encore des baguettes. Il y a autant de manières de manger que de mangeurs et de jours qui passent.
Quant à l’alimentation, à proprement parler, elle est un véritable « enjeu global : affectif, intime, social, culturel, anthropologique, économique, écologique, etc. », comme le met en exergue l’émission radiophonique Les Bonnes choses, à suivre chaque dimanche midi sur France culture. Mais si la cuisine est autant un art qu’un savoir-faire, qui repose aussi sur un savoir, il y a eu, ces 50 dernières années, une véritable révolution et avec elle, beaucoup de pertes. Si quantité de bonnes vieilles recettes de grand-mère sont soigneusement notées quelque part, sur un cahier ou dans les têtes, l’industrie agroalimentaire et l’alimentation industrielle ont considérablement modifié le rapport à la cuisine et à la table. L’impact sur la santé n’est plus à démontrer. En revanche, il est un fait qui, lui, agit insidieusement, il s’agit de la déconnexion, notamment chez les plus jeunes, entre les produits agricoles et les produits transformés ou ultra-transformés. En effet, aujourd’hui la plupart des enfants ignorent qu’une tranche de jambon est issue du fessier d’un porc, de même que la plupart des consommateurs ne savent pas ce qu’ils mangent réellement. Qui a le réflexe de lire la liste des ingrédients des produits industriels achetés au supermarché ? Quelle différence entre sucre et sirop de glucose-fructose ? Tant que le produit a un goût sucré. Pour beaucoup, seul le prix compte, l’alimentation doit coûter le moins cher possible. Tant pis pour le coût de revient pour le producteur de matières premières et pour sa paupérisation.
Toutefois, et nous nous en réjouissons, les acteurs responsables (individuels, collectifs, associatifs) sont tous les jours un peu plus nombreux à agir pour inverser la tendance. Il existe aujourd’hui une véritable prise de conscience des trop nombreux déséquilibres, tant au niveau de la santé publique (pandémies, dérégulations métaboliques à l’origine de pathologies d’industrialisation, chroniques, inflammatoires, cardiovasculaires ou encore dégénératives), de l’environnement (biodiversité, écosystèmes), que des économies (locales, géopolitiques). Ces consomm’acteurs font des choix, en préférant la qualité à la quantité, le bio au conventionnel, le fait maison à l’industriel, l’entier au raffiné, les saveurs naturelles aux saveurs artificielles, les produits saisonniers aux produits à l’année, les protéines végétales aux protéines animales, le flexitarisme à la viande à tous les repas, le vrac au conditionné, le local au global, les prix justes aux premiers prix, les petits volumes à la surproduction, l’usage des restes au gaspillage alimentaire. En somme, vers une consommation responsable et respectueuse de l’environnement.
Dès la rentrée, nous interrogerons le rapport plus personnel à l’alimentation. Il s’agira d’explorer les nombreuses cultures ou tendances alimentaires contemporaines, les « alimentations particulières » : intolérants ou allergiques, pratiquant la méthode Kousmine ou Seignalet, végétariens, végétaliens, « vegans », macrobiotes, halal, casher, locavores, crudivores et autres adeptes (au sens noble) des régimes paléo et cétogène. Nous questionnerons notamment le fait de savoir s’il s’agit de nouvelles tendances ou, à l’inverse, de résurgences de pratiques anciennes.
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