Le nerf vital

Vague pour le grand public et encore à certains égards pour la science, le nerf vague, appelé ainsi pour son vagabondage dans l’organisme, révèle peu à peu ses nombreuses fonctions et autant de perspectives pour être et rester en bonne santé.

Petit précis du nerf vague

Ce nerf, le plus grand du corps humain, est aussi appelé nerf parasympathique, cardiaque, pneumogastrique, cardio-pneumo-entérique ou encore, X ou NV. Ces vagues appellations en disent long sur son amplitude. En effet, il commence sa route dans la boîte crânienne, à l’endroit des fonctions autonomes de l’organisme, et se ramifie pour aller dans les moindres recoins : les oreilles, le pharynx et le larynx en passant par deux ganglions (supérieur et inférieur), il longe ensuite et en parallèle le cœur, les poumons et les bronches d’un côté et de l’autre, l’œsophage, l’estomac, le foie, le pancréas, la vésicule biliaire, la rate, les reins et enfin, l’intestin grêle et une bonne partie du côlon.

Avant d’explorer ses nombreuses fonctions, arrêtons-nous un instant sur le système nerveux autonome de l’organisme, celui grâce auquel nous n’avons pas à penser, jour et nuit, à faire battre notre cœur, à respirer, à cligner des paupières, à sécréter enzymes et hormones au moment du repas puis de la digestion, à vidanger sa vésicule biliaire, etc. Ce que nous pouvons contrôler (attraper sa tasse de tisane, bien mâcher sa bouchée, regarder un papillon qui vole, marcher jusqu’à la boîte aux lettres, etc.) relève du système nerveux somatique.

Le système nerveux autonome se divise en deux branches, l’une est appelée (ortho)sympathique, l’autre, parasympathique. La première est le mode alerte rouge ! Celui qui s’active lorsqu’on se retrouve face à un ours, en cherchant un petit coin de caverne pour y passer la nuit : les hormones du stress sont sécrétées en deux deux, l’apport énergétique est alors en illimité, bronches et pupilles se dilatent et les muscles se contractent (pour bien y voir et courir très vite). Aujourd’hui, l’ours a fait place à toutes sortes de stress, aux disputes, aux contrariétés, aux actualités anxiogènes, etc. La liste est devenue longue.

Le mode parasympathique est au contraire le repos du guerrier, le temps d’une bonne sieste, de la position allongée après une séance de sport ou encore d’une méditation. L’objectif est de ralentir les fonctions de l’organisme, pour lui permettre de se relaxer. Les conditions pour digérer sont alors optimales, les nutriments bien assimilés, les réserves d’énergie se remplissent, les muscles se décontractent. Parasympathique et sympathique sont antagonistes, et travaillent en synergie : quand l’un prend plus de place que l’autre, comme tout équilibre qui se rompt, c’est le début des soucis de santé, physique ou psychique. Nous verrons ça un peu plus tard.

Un réseau de communication

Le nerf vague fait partie du système parasympathique. Il assure la communication entre le cerveau d’où il part, et les organes où il a ses connexions. Ces informations, motrices, sensitives ou sensorielles, peuvent être afférentes (des organes vers le cerveau) ou bien efférentes (du cerveau aux organes), à raison de 80 % dans un sens (afférent) et 20 % dans l’autre (efférent). Les différents organes donnent ainsi des nouvelles de leur état mécanique ou chimique au cerveau, qui est informé en continu de leur bon fonctionnement ou, au contraire, des dysfonctionnements. Dans ce cas, il s’agit de réagir au plus vite.

Le nerf vague est aussi la ligne directe entre nos deux cerveaux, l’un dans la tête, l’autre dans le ventre. Les deux peuvent échanger autant qu’ils le souhaitent. Le soi papote à loisir avec le non-soi qu’est notre microbiote, composé de milliards de micro-organismes qui ne sont pas nous. Ces bactéries passeraient tranquillement commande au cerveau, via le nerf vague, selon leurs envies du moment : sucre, aliment mou, salé ou bien acide. Ceci expliquerait nos fringales intempestives alors que nous n’avons pas physiologiquement faim. Notre nerf vedette a donc aussi un rôle majeur dans l’immunité, puisque microbiote = immunité, pour la faire courte (et fondée).

À propos de faim mais aussi de satiété, là encore, le nerf vague est à son poste pour renseigner au cerveau quand on a « bien mangé, bien bu, merci petit Jésus ». Quantité et composition du repas sont transmises au cerveau, qui fera appel aux hormones concernées, la ghréline pour la faim, la leptine pour la satiété. Les personnes qui ne ressentent pas ou plus ces sensations ou celles qui souffrent de troubles de l’attention peuvent trouver la cause de leurs maux par un nerf vagal dans les chaussettes. À court terme, l’insatiabilité chronique laisse place à un surpoids et ses conséquences néfastes.

Le principal neurotransmetteur du nerf vague s’appelle l’acétylcholine. Il est le messager chimique chargé d’assimiler les informations comme ralentir la fréquence cardiaque, diminuer la taille des bronches, abaisser la tension artérielle, favoriser les péristaltismes, augmenter la sécrétion de la salive et autres sucs digestifs, absorber les nutriments, etc. Ensemble, ils assurent à peu près tout ce qui doit être régulé automatiquement dans l’organisme : le cœur de battre, les poumons de respirer, les paupières de ciller, le pharynx d’ouvrir les bonnes portes (aérienne ou digestive) au bon moment, les organes de la digestion de faire leur travail respectif, etc.

Le nerf vague et les réactions autonomes de l’organisme (cardio-vasculaire, trachéo-broncho-pulmonaire et digestive) sont conçus pour fonctionner comme du papier à musique, sous réserve que ce nerf multi-tâches soit au mieux de sa forme. Or, s’il fait partie intégrante du système nerveux parasympathique, son activation n’est pas autonome. Il appartient à chacun de nous de le stimuler, d’autant plus en vieillissant, lorsque le tonus vagal, comme la peau, tendent à se relâcher…

Allo, non mais allo quoi ?!

Lorsqu’il commence à manquer de tonus, le nerf vague ne parvient plus à communiquer correctement, la connexion est de plus en plus mauvaise et les problèmes s’installent, bien souvent sans en comprendre la cause (avant d’avoir lu cet article 😁).

Il y a d’abord de l’inflammation ici puis là, et enfin à tous les étages. On parle alors d’inflammation chronique. C’est le signe qu’un nerf vague n’est plus en capacité de faire le job, tandis qu’actif, il informe sur-le-champ le cerveau de savoir où et quand la combattre. Le Dr Navaz Habib, dans son livre Activez votre nerf vague, détaille très bien le lien entre nerf vague et inflammation. L’auteur donne aussi de précieux conseils simples pour lui redonner du tonus, sur lesquels nous nous étendrons sous peu.

Quand on sait que la plupart des maladies dites d’industrialisation, causées ou aggravées par l’inflammation, pourraient être soulagées voire guéries en activant son nerf vague, sans médications iatrogènes, ça mérite que l’on y regarde de plus près. Imaginez en finir avec le diabète, les TDAH, les nombreuses maladies inflammatoires de l’intestin, l’asthme, les migraines, la dépression, l’arthrose, l’épilepsie, les bradycardies, une transpiration excessive, etc. La plupart des organes affectés sont innervés, ne l’oublions pas, par le nerf vague. N’oublions pas non plus de mentionner le malaise vagal.

Dans les pommes

Si le nerf vague est souvent méconnu, la plupart d’entre nous avons entendu parler ou déjà subi un malaise vagal. Celui-ci survient généralement dans un contexte spécifique (grosse douleur, forte chaleur, grande fatigue) qui croise malencontreusement une situation brusque (stress supplémentaire). Tandis que le sympathique est peu actif, le nerf vague est subitement sous pression, suite à un événement de type goutte d’eau qui fait déborder le vase. Résultat, le premier s’active en augmentant la fréquence cardiaque et la tension artérielle que le parasympathique tente frénétiquement de faire baisser. S’ensuit une baisse de l’afflux de sang dans le cerveau, qui peut faire tomber dans les pommes. Un malaise vagal est généralement bénin et le réflexe de s’allonger pour rééquilibrer cœur et cerveau va permettre au second, de nouveau irrigué, de reprendre connaissance.

Stress et nerf vagal

Le stress est la cause de bien des maux, dont le dysfonctionnement du nerf vague. Cet état, quand il est récurrent, réduit l’activité du nerf vague, tandis qu’il augmente celle des nerfs sympathiques. En devenant chronique, le stress affaiblit le tonus du nerf vague, qui se met à dysfonctionner de plus en plus. Ses lésions peuvent alors toucher tous les organes qu’il croise : au niveau du cœur, des poumons, du foie, des intestins, etc. Au contraire, une activité vagale optimale, qui favorise un parasympathique réactif (soit une bonne capacité à se relaxer), déjoue les réponses au stress, que le sympathique titille. Le mieux reste encore d’apprendre à gérer son stress, inhérent à la vie. Tout y est anxiogène, la clé est de savoir quoi faire de cette anxiété. Nous suggérons l’accueil de ce qui arrive, bon ou mauvais, et la Capacité Naturelle à Réguler nos Emotions ou CNRE, deux remèdes très efficaces.

Un test simple permet de savoir si son nerf vagal est en bon état de fonctionnement, ou non. Après un pétage de plomb, êtes-vous capable de ralentir facilement votre rythme cardiaque ? Si la réponse est oui, votre nerf vague est en bonne forme, s’il vous faut beaucoup plus de temps, voici quelques conseils pour remédier à cette défaillance.

« Activez votre nerf vague »

Pour reprendre le titre de cet ouvrage mentionné plus haut et que nous vous recommandons vivement de lire, nous allons passer en revue les diverses manières de stimuler ce nerf vital pour être et rester en bonne santé. La bonne nouvelle est qu’elles sont nombreuses, faciles à mettre en œuvre, gratuites pour la plupart, efficaces et sans le moindre effet secondaire. Reste à s’y mettre et s’y tenir, puisque notre corps qui savait faire tout ça l’a oublié, dérégulé par un bon nombre de conditionnements sociaux.

Pêle-mêle, nous vous suggérons donc de :
chanter ou chantonner, dans votre voiture ou sous la douche, rappelez-vous que le nerf passe par les muscles de la gorge et qu’il participe à la production de nos vocalises,
dormir d’un sommeil réparateur, sans perturbation au moment de l’endormissement (écrans, wifi, etc.) et en dormant suffisamment, ce qui entraîne le nerf vague à bien faire son travail,
dormir sur le côté droit, pour favoriser une bonne variabilité de la fréquence cardiaque (VFC) et ainsi augmenter le tonus vagal,
respirer correctement, capital pour réguler son système nerveux, à savoir par le nez, avec le ventre de manière lente et profonde, plutôt qu’avec le thorax, rapidement et superficiellement,
pratiquer la cohérence cardiaque, celle préconisée par David O’Hare est intéressante : 3 séances quotidiennes de 6 respirations par minute, pendant 5 minutes, séance qu’il a baptisée 365,
mastiquer suffisamment,
méditer, que ce soit guidé ou pas, assis ou en marchant, seul.e ou avec d’autres,
s’exposer à la lumière du jour,
s’accoutumer au froid, en prenant des bains ou des douches froides, pas seulement en saison chaude, et en réduisant les couches de vêtements en hiver,
se gargariser avec un peu d’eau après chaque brossage dentaire,
donner de l’amour, en serrant dans vos bras les gens que vous aimez,
s’étirer dès que vous le pouvez,
pratiquer yoga ou Pilates, Tai chi ou Qi gong,
masser ou se faire masser, c’est selon, etc.

Ainsi que l’auriculothérapie, l’acupuncture, la réflexologie, la chiropraxie ou encore, la stimulation électrique pratiquées par un professionnel de santé.

Vous l’aurez compris, tout ce qui vous fait du bien et vous met en joie est bon pour votre nerf vague, en générant une activité accrue de sa part et de celle du système nerveux parasympathique.

Nerf vague et rapport au monde

Le nerf vague serait déterminant dès la naissance, définissant notre capacité à nous sentir en sécurité, ou pas, et des moyens différents pour nous protéger, par la fuite ou le combat, l’inhibition, etc. Cet état, appelé réflexe vagal, deviendrait dominant dans notre rapport au monde enfant puis devenu adulte. C’est la théorie polyvagale que nous ne développerons pas ici, puisque nos amis d’Alternative santé l’ont fait dans un article très complet.

Pour conclure parce qu’il est temps, nous sommes d’avis que le nerf vague mériterait d’être rebaptisé « nerf vital », tant il impacte pratiquement tous les organes du corps et notre état de santé global. Stimulons-le et restimulons-le encore avec de la joie pour conserver ou retrouver celle de vivre en pleine santé.

 

Texte : Julie Lioré
Illustration : Josephine Delannoy

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